Accrochage exceptionnel : Lautrec et la « leçon » impressionniste

Dans le cadre des 150 ans de l’Impressionnisme, le musée Toulouse-Lautrec présente (jusqu’au 9 juin 2024) trois
œuvres impressionnistes, prêtées par le musée d’Orsay, pour un accrochage exceptionnel :
deux Renoir et un Morisot.
Que peut nous apprendre le dialogue entre les portraits de Toulouse-Lautrec et ceux de ses contemporains impressionnistes ?

Le portrait de l’architecte Charles Lecoeur par Pierre Auguste Renoir est mis en parallèle avec celui du musicien Henri Dihau par Toulouse-Lautrec.
Les deux œuvres sont des portraits d’hommes en pied, peints en extérieur, comme l’apprécient autant les
impressionnistes que Lautrec. Les deux sont réalisés à l’huile : Renoir peint sur de la toile, Lautrec sur du carton. Les
deux supports ne se comportant pas de la même manière, le rendu est différent.
Renoir nous propose un portrait printanier, primesautier, d’une facture rapide, avec des empâtements de peinture.
La palette est claire, les contrastes assez forts et il joue des ombres colorées. L’homme est de face, dans un position et
une tenue plutôt décontractées.
Le portrait peint par Lautrec montre un homme de profil (composition plus hardie que celle de Renoir, de face qui est
plus classique). L’homme est plus âgé, dans une tenue plus classique … Ici pas d’ombre sur le visage de M. Dihau qui
est éclairé en totalité. Les contrastes sont également présents, la palette est moins lumineuse. La touche est longue et
rapide, elle donne une impression de spontanéité qui n’est pas présente dans le portait de Lecoeur par Renoir; le
support apparaît nettement par endroits.

Le tableau de Berthe Morisot « Sur un banc au bois de Boulogne » représente deux jeunes filles : sa fille et sa nièce, en
extérieur, dans un parc. Il répond à un portait d’Adèle Tapié de Céleyran, la mère d’Henri de Toulouse-Lautrec, assise devant une tasse, en intérieur. Les deux tableaux attirent les regards par leurs tonalités claires. Berthe Morisot est
une artiste , femme, qui a fortement influencé l’impressionnisme, ce qui est remarquable pour l’époque, où les femmes
artistes avaient encore du mal à se faire une place… Cette œuvre est typique de son travail, une scène intime, familiale,
ordinaire, rendue avec des couleurs claires. Le portrait d’Adèle Tapié de Céleyran joue lui aussi d’une palette extrêmement claire, plus réduite que dans celui de Mme Morisot. Il est à noter que Toulouse-Lautrec
admirait Edouard Manet, qui était le beau-frère de Berthe Morisot… Ces deux toiles témoignent-elles d’influences communes ?
Sur les deux tableaux, on peut remarquer une touche longue, juxtaposée, plus disjointe sur celui de Morisot (typique de
l’impressionnisme).

Le dernier tableau prêté par le Musée d’Orsay est à nouveau de Renoir : il s’agit de la « Liseuse », thème assez en
vogue chez les impressionniste et particulièrement chez Renoir, qui apprécies les scènes « intimistes »
ayant pour protagonistes des jeunes femmes dans la lumière artificielle d’un intérieur. Il voisine avec un
autre portait de la Comtesse de Toulouse Lautrec, représentée lisant elle aussi, dans le salon du château
de Malromé.
Dans ce tableau de Lautrec, touche divisée, lumière oblique et ombres colorées font écho
aux techniques impressionnistes. On retrouve cette touche divisée chez Renoir, chez qui elle prend une
forme presque carrée assez particulière. Les points communs sont nombreux et pourtant l’atmosphère
des deux tableaux est totalement différente, due essentiellement aux lumières choisies par les deux
artistes, chaude et presque violente chez Renoir, diffuse et froide chez Lautrec…
Cette petite lecture vous aura peut-être donné envie d’en savoir plus ? Nous vos invitons donc à venir
visiter cette exposition avec les guides de l’AGIT ! Elle est visible jusqu’au 9 juin, alors profitez-en !